Différences entre versions de « Concile Vatican I »

De Gregorius 3.0
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Convoqué par le pape [[Pie IX]] ([[bulle]] d'indiction [[Aeterni Patris]], 29 juin 1868), le premier concile du Vatican, vingtième concile oecuménique, se vit assigner pour objectifs principaux la défense de la vérité face aux erreurs du temps (essentiellement le rationalisme et le naturalisme) et l’adaptation de la discipline ecclésiastique comme de la législation héritée de l’époque tridentine.
 
Convoqué par le pape [[Pie IX]] ([[bulle]] d'indiction [[Aeterni Patris]], 29 juin 1868), le premier concile du Vatican, vingtième concile oecuménique, se vit assigner pour objectifs principaux la défense de la vérité face aux erreurs du temps (essentiellement le rationalisme et le naturalisme) et l’adaptation de la discipline ecclésiastique comme de la législation héritée de l’époque tridentine.
 
Si la question de l’infaillibilité pontificale n'était pas alors évoquée, elle s’invita dans le débat pré-conciliaire, à la suite de la publication d’une « Correspondance de France » dans la [[Civiltà cattolica]] du 6 février 1869, article qui laissait présager une définition de l’infaillibilité par acclamation, donc sans possibilité de discussion par les Pères. <br />   
 
Si la question de l’infaillibilité pontificale n'était pas alors évoquée, elle s’invita dans le débat pré-conciliaire, à la suite de la publication d’une « Correspondance de France » dans la [[Civiltà cattolica]] du 6 février 1869, article qui laissait présager une définition de l’infaillibilité par acclamation, donc sans possibilité de discussion par les Pères. <br />   
Le concile s’ouvrit le 8 décembre 1869, en la fête de l’Immaculée Conception, définie dogmatiquement 15 ans auparavant (8 décembre 1854), en présence de plus de sept cents prélats, en grande majorité européens. Cinq commissions préparatoires (d’initiative, de la foi, de la discipline, des ordres religieux, des rites orientaux et des missions), mises en place par une commission cardinalice générale préalable créée dès le mois de mars 1865, furent chargées d’élaborer les propositions, articulées en schémas, devant être discutées lors des congrégations générales réunissant l’ensemble des Pères dans l’aula conciliaire, laquelle occupait le bras droit du transept de la basilique Saint-Pierre.
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Le concile s’ouvrit le 8 décembre 1869, en la fête de l’Immaculée Conception, définie dogmatiquement 15 ans auparavant (8 décembre 1854), en présence de plus de sept cents prélats, en grande majorité européens.
En présence du pape et sous forme de constitution apostolique, l’assemblée conciliaire adopta, par un vote unanime le 24 avril 1870, le texte dogmatique [[Dei Filius]] ; traitant en quatre chapitres les questions de Dieu, de la révélation, de la foi et des rapports entre celle-ci et la raison, il opposait au panthéisme, au rationalisme et au matérialisme modernes un exposé dense de la doctrine catholique, venant en quelque sorte compléter positivement, par symétrie, les condamnations portées par le Syllabus ([[Syllabus errorum]], 1864). Sur cette même base, la commission théologico-dogmatique proposa, dès octobre 1869, un schéma sur l’Église (''De Ecclesia'') dont trois chapitres concernaient les rapports entre l’Église et les États, ainsi qu’un schéma ''De Romano Pontifice'' en deux chapitres mais qui n’évoquait pas l’infaillibilité. L’insertion de ce texte dans le schéma De Ecclesia forma un nouveau document, principalement rédigé par le théologien Klemens Schrader et intitulé ''Supremi Pastoris'', distribué aux Pères le 21 janvier 1870. Un chapitre sur l’infaillibilité, élaboré par le jésuite Josef Kleutgen et revu par le pape dans un sens proche de deux propositions faites peu auparavant par Mgr Dechamps et Mgr Manning, y fut introduit en mars, les instances romaines soulignant la nécessité que le concile se prononce effectivement sur la question. Encadrés par une procédure plus stricte (règlement du 22 février), les Pères disposèrent d’un délai de vingt jours, jusqu’au 25 mars, pour faire parvenir leurs observations écrites sur le chapitre XI ([[primauté]]) et le nouveau complément ([[infaillibilité]]) : le texte sur la primauté suscita 88 amendements, celui sur l’infaillibilité en fit naître à lui seul 139. Puis le schéma fut divisé en deux parties (27 avril) dont la première, seule discutée à partir de mai 1870, reçut le titre de ''Constitutio dogma prima De Ecclesia Christi'', « Pastor Aeternus ». Très vite, la discussion (13 mai – 16 juillet) se centra sur l’opportunité d’une telle définition, dont la reconnaissance exigea à elle seule quinze séances de travail ponctuées par plus de cinquante interventions. En définitive, la quatrième et dernière session publique du concile, présidée par le pape le 18 juillet 1870, adopta la constitution dogmatique ''''Pastor Aeternus'''' sur les prérogatives de l’évêque de Rome, qui comprenait un prologue et quatre chapitres (trois sur la primauté, un sur l’infaillibilité). Le texte limita la portée de l'infaillibilité pontificale aux enseignements solennels du pape (s'exprimant ''ex cathedra'', depuis la chaire de Pierre) et en matière de foi et de moeurs. Lors du vote final, les Pères ne pouvant que s’exprimer par « oui » ou par « non », le texte recueillit 533 ''placet'' (« oui ») sur 535 votes exprimés ; une cinquantaine d’entre eux avait préféré quitter Rome ou ne pas paraître dans l’''aula'' conciliaire ce jour-là.  
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En présence du pape et sous forme de [[constitution apostolique]], l’assemblée conciliaire adopta, par un vote unanime le 24 avril 1870, le texte dogmatique [[Dei Filius]] ; traitant en quatre chapitres les questions de Dieu, de la révélation, de la foi et des rapports entre celle-ci et la raison, il opposait au panthéisme, au rationalisme et au matérialisme modernes un exposé dense de la doctrine catholique, venant en quelque sorte compléter positivement, par symétrie, les condamnations portées par le Syllabus ([[Syllabus errorum]], 1864). Sur cette même base, la commission théologico-dogmatique proposa, dès octobre 1869, un schéma sur l’Église (''De Ecclesia'') dont trois chapitres concernaient les rapports entre l’Église et les États, ainsi qu’un schéma ''De Romano Pontifice'' en deux chapitres mais qui n’évoquait pas l’infaillibilité. L’insertion de ce texte dans le schéma De Ecclesia forma un nouveau document, principalement rédigé par le théologien Klemens Schrader et intitulé ''Supremi Pastoris'', distribué aux Pères le 21 janvier 1870. Un chapitre sur l’infaillibilité, élaboré par le jésuite Josef Kleutgen et revu par le pape dans un sens proche de deux propositions faites peu auparavant par Mgr Dechamps et Mgr Manning, y fut introduit en mars, les instances romaines soulignant la nécessité que le concile se prononce effectivement sur la question. Encadrés par une procédure plus stricte (règlement du 22 février), les Pères disposèrent d’un délai de vingt jours, jusqu’au 25 mars, pour faire parvenir leurs observations écrites sur le chapitre XI ([[primauté]]) et le nouveau complément ([[infaillibilité]]) : le texte sur la primauté suscita 88 amendements, celui sur l’infaillibilité en fit naître à lui seul 139. Puis le schéma fut divisé en deux parties (27 avril) dont la première, seule discutée à partir de mai 1870, reçut le titre de ''Constitutio dogma prima De Ecclesia Christi'', « Pastor Aeternus ». Très vite, la discussion (13 mai – 16 juillet) se centra sur l’opportunité d’une telle définition, dont la reconnaissance exigea à elle seule quinze séances de travail ponctuées par plus de cinquante interventions. En définitive, la quatrième et dernière session publique du concile, présidée par le pape le 18 juillet 1870, adopta la constitution dogmatique ''''Pastor Aeternus'''' sur les prérogatives de l’évêque de Rome, qui comprenait un prologue et quatre chapitres (trois sur la primauté, un sur l’infaillibilité). Le texte limita la portée de l'infaillibilité pontificale aux enseignements solennels du pape (s'exprimant ''ex cathedra'', depuis la chaire de Pierre) et en matière de foi et de moeurs. Lors du vote final, les Pères ne pouvant que s’exprimer par « oui » ou par « non », le texte recueillit 533 ''placet'' (« oui ») sur 535 votes exprimés ; une cinquantaine d’entre eux avait préféré quitter Rome ou ne pas paraître dans l’''aula'' conciliaire ce jour-là.  
 
Le concile laissa près de soixante schémas en suspens, dont la plupart ne connurent pas même un début de discussion mais qui facilitèrent les réformes partielles de la législation ecclésiastique réalisées sous [[Léon XIII]] puis la codification du droit de l’Église entreprise par [[Pie X]] en 1904 ([[motu proprio]] ''[[Arduum sane munus]]''), le concile Vatican I fut officiellement ajourné ''sine die'' par la [[bulle]] du 20 octobre 1870, moins d’un an après l’ouverture de ses travaux, en raison de l’entrée dans Rome des troupes italiennes menées par le général Cadorna (brèche de la Porta Pia, 20 septembre 1870) puis du plébiscite décidant, le 9 octobre, de l’annexion de Rome et des provinces adjacentes au royaume d’Italie.   
 
Le concile laissa près de soixante schémas en suspens, dont la plupart ne connurent pas même un début de discussion mais qui facilitèrent les réformes partielles de la législation ecclésiastique réalisées sous [[Léon XIII]] puis la codification du droit de l’Église entreprise par [[Pie X]] en 1904 ([[motu proprio]] ''[[Arduum sane munus]]''), le concile Vatican I fut officiellement ajourné ''sine die'' par la [[bulle]] du 20 octobre 1870, moins d’un an après l’ouverture de ses travaux, en raison de l’entrée dans Rome des troupes italiennes menées par le général Cadorna (brèche de la Porta Pia, 20 septembre 1870) puis du plébiscite décidant, le 9 octobre, de l’annexion de Rome et des provinces adjacentes au royaume d’Italie.   
  

Version du 21 octobre 2018 à 17:24

Convoqué par le pape Pie IX (bulle d'indiction Aeterni Patris, 29 juin 1868), le premier concile du Vatican, vingtième concile oecuménique, se vit assigner pour objectifs principaux la défense de la vérité face aux erreurs du temps (essentiellement le rationalisme et le naturalisme) et l’adaptation de la discipline ecclésiastique comme de la législation héritée de l’époque tridentine. Si la question de l’infaillibilité pontificale n'était pas alors évoquée, elle s’invita dans le débat pré-conciliaire, à la suite de la publication d’une « Correspondance de France » dans la Civiltà cattolica du 6 février 1869, article qui laissait présager une définition de l’infaillibilité par acclamation, donc sans possibilité de discussion par les Pères.
Le concile s’ouvrit le 8 décembre 1869, en la fête de l’Immaculée Conception, définie dogmatiquement 15 ans auparavant (8 décembre 1854), en présence de plus de sept cents prélats, en grande majorité européens. En présence du pape et sous forme de constitution apostolique, l’assemblée conciliaire adopta, par un vote unanime le 24 avril 1870, le texte dogmatique Dei Filius ; traitant en quatre chapitres les questions de Dieu, de la révélation, de la foi et des rapports entre celle-ci et la raison, il opposait au panthéisme, au rationalisme et au matérialisme modernes un exposé dense de la doctrine catholique, venant en quelque sorte compléter positivement, par symétrie, les condamnations portées par le Syllabus (Syllabus errorum, 1864). Sur cette même base, la commission théologico-dogmatique proposa, dès octobre 1869, un schéma sur l’Église (De Ecclesia) dont trois chapitres concernaient les rapports entre l’Église et les États, ainsi qu’un schéma De Romano Pontifice en deux chapitres mais qui n’évoquait pas l’infaillibilité. L’insertion de ce texte dans le schéma De Ecclesia forma un nouveau document, principalement rédigé par le théologien Klemens Schrader et intitulé Supremi Pastoris, distribué aux Pères le 21 janvier 1870. Un chapitre sur l’infaillibilité, élaboré par le jésuite Josef Kleutgen et revu par le pape dans un sens proche de deux propositions faites peu auparavant par Mgr Dechamps et Mgr Manning, y fut introduit en mars, les instances romaines soulignant la nécessité que le concile se prononce effectivement sur la question. Encadrés par une procédure plus stricte (règlement du 22 février), les Pères disposèrent d’un délai de vingt jours, jusqu’au 25 mars, pour faire parvenir leurs observations écrites sur le chapitre XI (primauté) et le nouveau complément (infaillibilité) : le texte sur la primauté suscita 88 amendements, celui sur l’infaillibilité en fit naître à lui seul 139. Puis le schéma fut divisé en deux parties (27 avril) dont la première, seule discutée à partir de mai 1870, reçut le titre de Constitutio dogma prima De Ecclesia Christi, « Pastor Aeternus ». Très vite, la discussion (13 mai – 16 juillet) se centra sur l’opportunité d’une telle définition, dont la reconnaissance exigea à elle seule quinze séances de travail ponctuées par plus de cinquante interventions. En définitive, la quatrième et dernière session publique du concile, présidée par le pape le 18 juillet 1870, adopta la constitution dogmatique 'Pastor Aeternus' sur les prérogatives de l’évêque de Rome, qui comprenait un prologue et quatre chapitres (trois sur la primauté, un sur l’infaillibilité). Le texte limita la portée de l'infaillibilité pontificale aux enseignements solennels du pape (s'exprimant ex cathedra, depuis la chaire de Pierre) et en matière de foi et de moeurs. Lors du vote final, les Pères ne pouvant que s’exprimer par « oui » ou par « non », le texte recueillit 533 placet (« oui ») sur 535 votes exprimés ; une cinquantaine d’entre eux avait préféré quitter Rome ou ne pas paraître dans l’aula conciliaire ce jour-là. Le concile laissa près de soixante schémas en suspens, dont la plupart ne connurent pas même un début de discussion mais qui facilitèrent les réformes partielles de la législation ecclésiastique réalisées sous Léon XIII puis la codification du droit de l’Église entreprise par Pie X en 1904 (motu proprio Arduum sane munus), le concile Vatican I fut officiellement ajourné sine die par la bulle du 20 octobre 1870, moins d’un an après l’ouverture de ses travaux, en raison de l’entrée dans Rome des troupes italiennes menées par le général Cadorna (brèche de la Porta Pia, 20 septembre 1870) puis du plébiscite décidant, le 9 octobre, de l’annexion de Rome et des provinces adjacentes au royaume d’Italie.


Sources

1870

Berteaud (Jean-Baptiste-Pierre-Léonard) [Mgr], L’Église, la papauté, le concile. Lettres pastorales de l’évêque de Tulle, Tulle, E. Daloux et Tandron, 1870, 316 p.

1871

Fisquet (Honoré), Biographies, portraits et autographes des Pères du Concile Premier du Vatican, Paris, Pilon, 1871, 280 p.

1877

Guérin (Paul) [Mgr], Concile œcuménique du Vatican. Son histoire, ses décisions, en latin et en français, avec tous les documents relatifs à ses délibérations, du 29 juin 1868 au 20 octobre 1870, Bar-le-Duc – Paris, Typ. des Célestins ; Bertrand – Bloud et Barral, 1877, 197 p.

1887
Yriarte (Charles), Autour du Concile : souvenirs et croquis d'un artiste à Rome..., 90 ill. de Détaille, Godefroy-Durand, Lix, [et al.] ; eaux-fortes d'après Heilbuth, Paris, J. Rothschild, 1887, VIII-312 p.


Bibliographie

1930

Butler (Edward Cuthbert) [Dom], The Vatican Council. The Story told from inside in Bishop Ullathorne’s letters, Londres ; New York, 1930, 2 vol. ; nouv. éd. Londres, Collins and Harvill, 1962.